État des ressources en eau en France : faut-il s’inquiéter d’une pénurie ?
Date de publication : 20 janvier 2020 | Dernière modification : 4 juillet 2024
Comment en arrive-t-on à manquer d’eau ?
De l’eau qui coule avec un débit très faible à la sortie du robinet… C’est ce qu’ont vécu certains habitants ces dernières années lors des épisodes de canicules et de sécheresse. Durant cette période, les nappes phréatiques de certaines régions ont vu leur niveau baisser en-deçà des seuils normaux et de fait, des mesures de restriction ont été mises en place pour préserver les ressources.
La combinaison de plusieurs facteurs peut conduire à un manque ponctuel d’eau :
- Un climat sec et chaud empêchant les nappes phréatiques de se recharger correctement.
- Une canicule précoce, c’est-à-dire qui survient avant les vacances d’été : les entreprises fonctionnent à plein régime alors que les châteaux d’eau peinent à se recharger assez pour alimenter efficacement la population.
- Une consommation importante d’eau, parfois aggravée par le street-pooling en milieu urbain.
Ainsi, ces dernières années, de nombreuses collectivités ont été ponctuellement touchées par des ruptures d’approvisionnement. Les entreprises de l’eau ont mobilisé des moyens humains et par endroits l’eau potable est arrivée en camions-citernes, et près d’un million de bouteilles d’eau ont été distribuées. Ces phénomènes sont plus courants qu’il n’y paraît et ne se limitent plus aux régions ayant une faible pluviométrie.
Qu’en est-il des ressources en eau en France ?
Malgré des épisodes de sécheresse à répétition pouvant entraîner une diminution des réserves en eau ainsi que des difficultés d’approvisionnement, peut-on pour autant parler d’un risque de pénurie en France ?
Des réserves en eau largement supérieures aux besoins
L’état des réserves en eau en France est très rassurant : le pays dispose d’une ressource en eau disponible de 193 milliards de m3 par an alors que les besoins en eau du pays s’élèvent à 32 milliards de m3 pas an. La France dispose ainsi d’un stock disponible largement supérieur aux besoins en eau de la population, préservant la population d’un risque de stress hydrique.
Alors que le seuil de stress hydrique établi par l’Organisation mondiale de la santé s’élève à 1 700 m3 par habitant et par an, chaque Français dispose en moyenne d’une réserve de 3 265 m3 d’eau par an.
Une capacité de stockage élevée…
En plus du niveau très satisfaisant de nos réserves en eau, la France bénéficie d’une excellente capacité de stockage grâce à :
- Sa pluviométrie,
- Ses grandes chaînes de montagnes,
- Un réseau hydrographique étendu,
- D’importantes nappes souterraines.
Bien entendu, tous les territoires ne bénéficient pas des mêmes configurations géologiques et certaines régions, comme la Bretagne, disposent de ressources souterraines moins importantes qu’ailleurs du fait de leur sol granitique.
… mais des nappes phréatiques qui peinent à se recharger correctement
Chaque mois, le BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) publie un état des nappes souterraines, afin d’observer les variations de niveaux des nappes au fil des mois.
Selon cet organisme spécialisé, les pluies abondantes survenues après un été de sécheresse n’ont pas suffi à recharger totalement les nappes qui accusaient encore cet automne un déficit pluviométrique sur l’année. En revanche, le mois de décembre 2018 s’est caractérisé par une forte remontée des niveaux des nappes phréatiques, grâce, notamment, aux pluies très abondantes de l’automne. La situation devrait donc continuer à se stabiliser dans les prochaines semaines. Cela nous permet d’espérer que l’ensemble des nappes puissent atteindre des niveaux satisfaisants pour la fin de l’hiver.
Carte de France de la situation des nappes au 1er janvier 2020. © BRGM
Sur la carte suivante qui présente l’évolution des niveaux des nappes, on observe que de nombreuses nappes phréatiques restent à un niveau de modérément bas à très bas (ex : le couloir rhodanien présente des niveaux très bas sur les deux derniers mois). Aussi, d’après les prévisionnistes de la BRGM, « Le début précoce de la recharge et les prévisions pluviométriques pour fin 2019 laissent présager une recharge longue ».
Un renouvellement des stocks mis à mal par le réchauffement climatique
Le réchauffement climatique a pour conséquence un allongement des périodes de sécheresse et une diminution des périodes de pluie, avec de surcroît des pluies qui deviennent de plus en plus orageuses et peinent à s’infiltrer correctement dans les sols.
Selon Laurence Gourcy du BRGM, le renouvellement des stocks est rendu difficile par des problématiques saisonnières :
- En hiver, la pluviométrie est importante et les besoins sont faibles.
- En été, les pluies ne parviennent pas à recharger complètement les nappes alors que les besoins en eau sont beaucoup élevés qu’en hiver. De plus, l’eau s’évapore beaucoup plus en été.
Pas de risque de pénurie, mais une bonne gestion des ressources s’impose
Comme nous l’avons observé ces dernières années, la France n’est pas à l’abri de situations tendues en termes d’approvisionnement en eau dans certaines régions et de manière ponctuelle. Toutefois, cela ne remet pas en cause l’état de nos ressources en eau, les stocks étant largement suffisants pour alimenter les besoins en eau de la population.
De plus, les réserves naturelles (aquifères, rivières) se renouvellent sans cesse et permettent d’utiliser l’eau qui nous arrive au moment où elle tombe sans avoir besoin de puiser dans les réserves fossiles. Tout l’enjeu consiste alors à anticiper les manques et à gérer les ressources en eau afin de réalimenter les nappes lorsque leur niveau devient trop bas, en utilisant des eaux de surface ou des eaux usées assainies.
Quelques modes de recharge artificielle dans différents environnements hydrogéologiques (Source SIGES Normandie).