Les perturbateurs endocriniens dans l’eau : quelle influence sur la santé humaine ?
Lors de sa session du 11 au 14 mars 2013, le Parlement européen se prononcera sur une réduction de l’exposition aux perturbateurs endocriniens. Derrière cette désignation un peu vague se cache un ensemble de substances, notamment certains pesticides ou plastifiants, qui peuvent interférer avec les hormones. Quelle est l’implication éventuelle de l’eau dans l’exposition aux effets de ces perturbateurs ?
La voie alimentaire
On peut tout incriminer : l’air, le sol, les sédiments, l’eau, la nourriture et les produits de consommation… Pour les humains, l’alimentation, hors apport hydrique, est la source d’exposition majeure. L’importance des phytoestrogènes par rapport à l’exposition environnementale apparaît clairement. On considère, par exemple, que les apports journaliers en phytoestrogènes par les aliments à base de soja (par exemple lait maternisé à base de soja) sont du même ordre que les doses d’œstrogènes prescrites aux femmes ménopausées.
A côté de l’alimentation, de multiples sources ont été incriminées
Des phtalates contenus dans les jouets peuvent être absorbés par les jeunes enfants. Dans des pansements dentaires à base d’epoxy, du bisphénol A peut migrer au cours de la première heure de leur pose. Boîtes de conserve en acier ou emballages de boissons revêtus de polycarbonates peuvent relarguer du bisphénol A…
A la lumière de la littérature, des faits démontrés dans le monde animal
La présence de composés perturbateurs endocriniens dans l’environnement est une réalité : ils proviennent tout à la fois de l’activité industrielle, des rejets de l’activité humaine ou de l’activité agricole. Les cas de troubles de la reproduction et du développement imputables à des perturbateurs endocriniens sont bien documentés pour de nombreuses espèces animales. le milieu aquatique étant contaminé par de nombreux polluants chimiques. Dans les zones les plus contaminées, l’exposition à ces substances entraine des effets sur les organes reproducteurs (poissons, mollusques, oiseaux, alligators, phoques…).
Pour l’homme : quel niveau de preuve ?
Si de nombreuses études mettent en évidence l’impact de perturbateurs endocriniens sur la vie aquatique, les associations pathologiques objectivées chez l’homme restent rares. Il semble donc prématuré de conclure à un lien de cause à effet. Cependant, bien évidemment, la précaution s’impose, les effets à long terme de multi-expositions demeurant inconnus.
Eau et perturbateurs endocriniens : la gestion du risque
Les connaissances disponibles montrent qu’en Europe occidentale, tout au moins, le risque d’une contamination significative de l’eau potable par des composés perturbateurs endocriniens paraît peu probable. La protection apportée par les usines équipées de traitement multi-barrières apparait performante. La question peut cependant se poser pour les eaux souterraines en l’absence de traitement d’affinage en cas de pollutions par des composés très particuliers.
L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a reconnu que l’eau potable ne constitue a priori qu’une voie mineure d’exposition aux perturbateurs endocriniens. Jusqu’à présent, la Commission européenne n’a pas ainsi jugé pertinent de fixer des valeurs de concentration maximale admissibles à respecter dans l’eau potable.
Dans le domaine de l’assainissement des eaux usées, la réglementation a intégré le risque lié aux perturbateurs endocriniens. La Directive Cadre sur l’Eau de 2001 impose d’éradiquer des perturbateurs endocriniens. En France, une étude a évalué la présence d’œstrogènes dans les eaux d’entrée et de sortie de trois stations de dépollution des eaux usées. On a mis en évidence une efficacité très marquée avec des pourcentages d’abattement de 70 à 85 %, sachant qu’interviennent ensuite des phénomènes de dilution en rivière.
En France, une stratégie sur les perturbateurs endocriniens est prévue pour juin 2013.
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