L’eau, les filles et l’école

Hier en Afghanistan, 150 collégiennes ont été volontairement empoisonnées par de l’eau du robinet : « Nous sommes sûrs à 100 % que l’eau qu’elles ont bue à l’école était empoisonnée. C’est « l’œuvre d’adversaires de l’éducation des filles ou d’individus irresponsables armés », note Le Monde en rapportant les propos d’un responsable des autorités éducatives.  Une partie des jeunes filles sont dans un état grave.

Certes, sur la planète, les filles sont souvent les victimes de l’eau. Cette fois, nous ne pouvons plus accepter l’inacceptable. Ce drame est là pour nous rappeler qu’encore trop souvent l’eau est la cause indirecte du non accès des filles à l’éducation et donc à l’indépendance. Plus de la moitié des enfants non scolarisés sont des filles. Une sur cinq ne termine pas le cycle de primaire. Dans les pays où il n’y a pas de réseau d’eau potable, ce sont les petites filles qui sont chargées de la corvée d’eau. Pour rapporter plusieurs fois par jour 50 litres d’eau.

Quand l’eau n’est pas salubre, les maladies hydriques provoquent un absentéisme malheureusement régulier. Quand il n’y a pas de toilettes dans les écoles, ou que les latrines n’ont pas de portes pour les protéger, les filles restent chez elles. C’est encore une raison de ne pas envoyer les filles à l’école

Je pense à ces millions de femmes qui meurent de maladies hydriques (choléra, typhoïde) ou de maladies liées à un environnement insalubre (paludisme, fièvre noire…). Le Centre d’information sur l’eau relève dans une de ses études que même en France (on le sait moins, eh oui!), des milliers de filles mettent leur santé en danger. D’abord en se retenant d’aller aux toilettes durant toute la journée d’école (la porte des toilettes ne ferme pas ou la saleté y est rebutante). Et ensuite, en ne buvant pas parce qu’il n’y a pas d’eau du robinet à leur disposition, ou bien souvent parce que le seul point d’eau se situe dans des toilettes sales.

Le 2 juillet 2010, l’Assemblée générale des Nations Unies a voté à l’unanimité la création d’un organe onusien unique chargé d’accélérer les progrès vers l’égalité entre les sexes et l’autonomisation des femmes : l’organisation des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, ou ONU Femmes. « Les femmes et l’eau » constitue également un domaine thématique prioritaire d’ONU-Eau dans son programme de travail 2010-2011.

Promouvoir l’égalité des sexes et renforcer l’autonomisation des femmes dans le monde représente l’une des deux priorités générales de l’UNESCO pour 2008-2013.  La Directrice générale de l’UNESCO, Mme Irina Bokova, a réaffirmé son engagement envers l’équité hommes-femmes dans son énoncé de mission intitulé « L’UNESCO dans un monde globalisé : un nouvel humanisme pour le XXIe siècle » où elle déclare : « Je considère que l’égalité entre les sexes figure parmi les objectifs politiques et humanistes les plus importants de notre temps. ».

En attendant, je crains que le sort de ces jeunes Afghanes provoquent moins de colère que celui des Bouddhas de Bâmiyân…

 

Photo © Thibault Sallé pour La simple agence.

 

 

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Marillys Macé

Directrice générale du Centre d’information sur l’eau, dont la vocation est d'apporter des connaissances pédagogiques sur l'eau distribuée et sur la gestion de l'eau en France, d'analyser les comportements des consommateurs et d'analyser le discours des médias.

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